En lisant avec beaucoup de plaisir et d’intérêt, le dernier livre de Françoise Vergès, « Programme de désordre absolu : décoloniser le musée », j’ai repensé à l’une des ateliers qu’elle avait organisé à Bétonsalon en 2016 et qui s’appelait « Cartographie de l’espace postcolonial ». Françoise invitait les participants à rapporter quelque chose – une image, un dessin, une chanson, un texte, un film… – qui puisse contribuer à composer cet espace à la fois concret et imaginaire, ce lieu habitable, de mémoire et désir pour des vies bonnes malgré les traumatismes. J’ai toujours pensé que nos luttes manquaient parfois d’humour, que la farce devait être l’une de nos armes quand nous nous sentons en colère, démuni·es, et le sarcasme de nos ruses, de nos méthodes d’auto-défense et de ralliement. Lors de l’atelier de Françoise, j’avais alors pensé à une grotte, à deux grottes mêmes, la grotte d’Ouvéa en Nouvelle-Calédonie et celle de Lascaux en Dordogne. Deux grottes qui avaient hanté ma jeunesse. J’en étais resté là. Plus tard, pendant le confinement, j’ai commencé à écrire une série de courts textes, en vue d’un livre en forme de farce décoloniale : « Les lettres du Palais ». Voici l’une d’elles. Où le Ministère bruissent des rumeurs d’une nouvelle merveille muséale, où l’on parle de grottes, de mémoire et de Ben Laden.
